Avec l’inversion de la pyramide des âges et l’arrivée de la « génération Y », les organisations se sont lancées dans de vastes transformations, faisant preuve de créativité et de fantaisie à toute épreuve, pour se rendre attractives auprès des jeunes talents.
Au diable la hiérarchie, avec son leader froid mais respecté (trop souvent un homme en costume et cravate) et ses bureaux fermés avec plaquette de signalisation indiquant nom et titre du bienheureux occupant. Place désormais au baby-foot dans les cafétérias, aux canapés et hamacs pour la sieste, aux distributeurs de Chupa Chups, aux bermudas et t-shirts qui remplacent l’austère costume, et aux systèmes d’organisation fondés sur la mise en œuvre formalisée de l’intelligence collective.
Nous assistons, à notre avis, à un processus d’infantilisation des collaborateurs afin de rendre l’expérience du travail ludique.
Notre travail dans le recrutement nous permet de rendre visite à des centaines d’entreprises chaque année. Croyez-le ou non, nous n’avons jamais vu des collaborateurs dormir pendant les heures de travail ou participer à des tournois de baby-foot à 10 heures du matin. Nous n’avons pas non plus découvert des sociétés dans lesquelles la direction n’est pas incarnée par une personne, bien que les équipes se gèrent elles-mêmes grâce à un système de prise de décision répartie dans l’organisation.
Toutes ces mesures ressemblent trop souvent à un marketing employeur peu abouti. La véritable joie est toujours celle qui naît d’une création, d’un travail dans lequel nous pouvons trouver du sens, dans lequel nous pouvons mettre à profit nos idées et nos initiatives dans un cadre où règnent autonomie, sérénité et bienveillance. A contrario, le malheur réside dans l’incapacité à éprouver ce sentiment d’accomplir et de façonner quelque chose. Depuis le Taylorisme, nous savons que le manque de sens, c’est-à-dire l’impossibilité de voir comment son travail peut transformer le monde, provoque des frustrations et des maladies professionnelles chez l’être humain.
Le leader ne doit pas disparaître, mais se transformer en donnant un cadre, une vision, et non pas des instructions précises qui limitent l’épanouissement de ses subordonnés. L’holacratie ne remplacera pas le besoin de leadership dans les organisations.
Nous ne pensons pas que les jouets au travail et l’infantilisation soient des solutions à long terme. Ce qui fonctionne véritablement pour la motivation des collaborateurs sont le respect, l’indépendance, la flexibilité dans l’organisation du temps, la confiance, la gratitude, la responsabilisation, l’écoute active, un leadership clair et une vision à long terme engageante.
Rien de nouveau sous le soleil. Tout le reste est un bruit de fond.