Il existe actuellement une sorte de dogme dans le monde de l’entreprise : pour atteindre le sommet de la hiérarchie, ou parfois tout simplement pour survivre, il faut être habile politiquement. Il faut être visible, cultiver son réseau interne, mettre en avant son travail, faire sa propre promotion et se rendre indispensable. Pris ainsi, le terme « politique » a une connotation négative, liée sans doute à la perception que celui qui l’exerce est sournois, recherche des faveurs ou essaie d’avancer sans le mériter. Or la politique est bien plus que cela : elle est aussi l’outil de ceux d’entre nous qui ont envie de prendre des responsabilités, de diriger, de s’exposer pour les autres. L’attrait du pouvoir est une caractéristique très personnelle, souvent innée, parfois façonnée. L’envie, ou le besoin, d’exercer le pouvoir est un trait de personnalité qui peut déboucher sur une fonction permettant l’utilisation de ce même pouvoir.
En discutant récemment avec un cadre-dirigeant d’une prestigieuse société internationale à Genève, nous avons appris que l’un des principaux axes de réflexion avec son coach en développement était justement l’exercice de la politique. En effet, ce manager est une personne talentueuse, impliquée et fidèle, appréciée par ses équipes et qui travaille sans compter ses heures dans l’intérêt de son entreprise. En revanche, cette personne néglige la politique. Par exemple, lors d’un meeting international, soucieux de réduire le coût de son déplacement pour son entreprise (absence du bureau, hôtel, etc.) et d’optimiser son temps, il a l’habitude de faire le voyage aller-retour le même jour. Alors que, pour « soigner la politique », il devrait arriver avec un jour d’avance pour rencontrer d’autres collègues, serrer des mains, partager des repas et se rendre visible. Ce changement a porté ses fruits puisque son image dans l’entreprise s’est améliorée alors que son engagement total reste de mise. Ce que nous ignorons de notre cadre, et ce qui représente le fond de la question, est de savoir s’il est plus heureux dans sa nouvelle situation.
Qu’on le veuille ou non, la politique fait partie intégrante de la vie d’entreprise. La question que chacun doit se poser est de savoir ce que l’on veut et quels sont nos objectifs. Mais on ne peut jamais reprocher à quelqu’un ses ambitions, tout au plus la manière de vouloir les atteindre. Ce que l’on demande avant tout à un collaborateur est de faire de son mieux dans ce qu’il est censé accomplir. S’il souhaite avancer dans son organisation, c’est son droit le plus strict et si la politique est son outil, qui sommes-nous pour juger ? L’habileté en politique sert ceux qui ont soit la soif, et on l’espère les compétences, de diriger, soit, malheureusement, parfois, ceux trop paresseux ou incapables d’avancer par leurs propres compétences professionnelles.